
Avec l’opération « Lion qui se dresse », Israël a opéré un basculement stratégique d’ampleur. Alors que l’armée israélienne s’enlisait depuis plusieurs mois dans une guerre asymétrique où 2 millions d’habitantEs sont délibérément affaméEs dans la bande de Gaza, la frappe aérienne ciblée contre des infrastructures nucléaires iraniennes et des hauts cadres des Gardiens de la Révolution replace le pays dans une logique de confrontation État contre État classique. Une initiative israélienne qui redéfinit le théâtre du conflit, recentre l’agenda diplomatique, mais soulève une série d’interrogations fondamentales — au premier rang desquelles la question de la non-prolifération nucléaire.
Ces frappes ciblées — sur des installations nucléaires et des figures clés du régime iranien, ainsi que des scientifiques et des responsables nucléaires de haut niveau — opèrent un double déplacement :
- militaire d’abord, en passant d’une guerre irrégulière à un affrontement classique entre États ;
- diplomatique ensuite, en réorientant les regards depuis Gaza vers Téhéran. L’effet est immédiat : on ne parle plus de la “Freedom flotilla”, encore moins des marches populaires de citoyennEs pacifistes qui tentent d’approcher la frontière pour briser le blocus imposé à la population gazaouie.
Illico, les États-Unis se rallient à la logique stratégique israélienne alors qu’une rencontre avait pourtant été annoncée dimanche 15 juin entre Etats-Unis et Iran à Oman, pour tenter de parvenir à un accord sur la question nucléaire iranienne, tandis que la France suspend ses velléités de reconnaissance de l’État palestinien dans une initiative diplomatique internationale. Israël, isolé la veille, redevient en quelques heures un acteur central dans une région à nouveau structurée par la confrontation d’États-nations.
Cette démonstration de force soulève une question essentielle, trop peu abordée : celle de la non-prolifération nucléaire. Israël justifie son action au nom de la prévention d’une menace existentielle — celle de l’Iran doté de la bombe nucléaire. Or, l’État hébreu, qui n’a jamais signé le traité sur la non-prolifération (TNP), est lui-même une puissance nucléaire officieuse (dotée de 90 ogives nucléaires, selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm -Sipri – ), hors de tout contrôle international (couvert par les États-Unis, la France, la Grande Bretagne). En s’arrogeant le droit de frapper un programme nucléaire étranger, sans mandat de l’ONU, ni preuve publique d’imminence, Israël affaiblit un régime de sécurité collective déjà fragilisé, notamment depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie et les menaces sur les centrales nucléaires ukrainiennes (Zaporijia).
Ce paradoxe n’est pas nouveau. Mais il devient explosif dans un contexte où la logique du fait accompli par la force prime sur celle du droit. Si chaque puissance régionale se croit légitime à frapper préventivement au nom de sa propre sécurité, la notion même de dissuasion perd son sens.
Israël a peut-être gagné une manche : en reprenant l’initiative, en réorientant les regards pour détourner l’attention, en ralliant ses alliés. Mais cette victoire tactique pourrait être à double tranchant. Car derrière ces attaques ciblées se profile un pari à haut risque : celui d’une escalade régionale où l’ombre du nucléaire, même en creux, suffit à radicaliser les positions.
Au centre de cette opération se trouve, une fois encore, Benyamin Netanyahou. Rompu à l’art de transformer les crises en leviers politiques, il confond désormais son sort avec celui de l’État, inscrivant la stratégie israélienne dans une logique d’audace unilatérale. Mais, à l’heure où le monde vacille entre ordre ancien et instabilité globale, il n’est pas certain que ce volontarisme nucléaire renforce, à terme, la sécurité d’Israël — ni celle du monde.
Peps condamne les agressions répétées du gouvernement Netanyahou sur l’Iran, la Syrie, le Liban et les territoires occupés. Nous condamnons également le non-respect de l’espace aérien des pays de la région au mépris total du droit international. Nous dénonçons le discours politique qui répète à l’envie « le droit d’Israël à se défendre », alors que tout est fait par le gouvernement Netanyahou pour semer le chaos dans la région, dans une visée expansionniste.
PEPS appelle à :
– l’élimination totale des armes nucléaires, menace existentielle pour l’ensemble du vivant. Faisons campagne pour que le 26 septembre, journée internationale pour l’élimination des armes nucléaires, soit à la hauteur des menaces qui pèsent sur nous.
– la sortie de la France de l’Otan
– la création d’une confédération des peuples du Moyen Orient.
Nous sommes un peuple monde. Face aux impérialismes et aux fascismes à leur service, unissons nous !
PS: Donnons-nous également rendez-vous le 20 septembre à Bure pour la Manif du futur, contre la poubelle nucléaire. https://manifbure.fr/