Contre la violence de l’État et la criminalisation de la jeunesse Pour le droit à la protection de tous les enfants

Toutes et tous dans la rue le 21 avril

Chaque jour, la droite macroniste et l’extrême droite instrumentalisent un fait divers pour stigmatiser et criminaliser les enfants et la jeunesse. La jeunesse est devenue le nouvel « ennemi intérieur » au même titre que les écologistes transformés en éco terroristes ou que les activistes du mouvement de solidarité avec la Palestine accusés de complicité avec les djihadistes.

De Mayotte à Paris  les enfants, qu’ils soient français ou mineurs étrangers isolés, sont traqués et pourchassés dans les forêts ou dans les rues, quand la police ne les tue pas, comme Nahel à Nanterre en juin 2023, ou qu’on les laisse se noyer dans la Manche près de Calais. Le pouvoir n’a comme réponse que la matraque ou l’embrigadement dans une logique de guerre, via le Service National Universel (SNU) ou l’imposition de l’uniforme à ‘école.

Alors que la délinquance juvénile n’a pas augmenté depuis 15 ans, le nombre d’enfants privés de liberté n’a jamais été aussi élevé en France que depuis ces deux dernières années.

Sur le plan pénal, la justice des mineurs est régie par l’ordonnance du 2 février 1945, fruit du Conseil National de la Résistance. Dans son préambule, cette ordonnance précise que « La France n’est pas assez riche de ses enfants pour en négliger un seul » et repose sur le principe fondateur de la primauté de l’éducatif sur le répressif. Depuis 1945, ce texte a été largement modifié, dont certains articles plusieurs fois. L’empilage législatif rend aujourd’hui la justice des enfants chaque fois plus répressive, plus expéditive et tend à la rapprocher de plus en plus de celle des majeurEs.

Une justice protectrice et émancipatrice passe par la construction de relations éducatives et d’expériences sociales avec suffisamment de bienveillance, de temps et de moyens pour permettre la sortie de délinquance.

Elle nécessite aussi des actions préventives et d’une manière générale la fin de la pauvreté et des discriminations. Or actuellement, les réponses apportées à la délinquance des mineurEs sont de moins en moins éducatives et aidantes pour ces enfants et leurs familles. Depuis des mois, voire des années, tous les acteurs et actrices de la prévention et de la protection de l’enfance alertent sur les dysfonctionnements majeurs de l’ASE et des services publics de la jeunesse.

Début avril 2024, le parlement a acté la création d’une commission d’enquête sur les manquements des politiques de protection de l’enfance. Environ 300 000 enfants sont pris en charge par l’ASE Aide sociale à l’enfance. Des témoignages de jeunes ayant subi des violences et maltraitances durant leur placement, des témoignages des travailleurs et travailleuses sociales broyéEs par leur boulot, sont des signaux forts quant à l’incurie de l’Etat et des collectivités départementales en matière de protection de l’enfance. Que ce soient les conditions d’accueils dégradées ou les conditions de travail infernales: tout est en place pour que la maltraitance du système soit une effrayante réalité.

Le 25 janvier 2024, Lily âgée de 15 ans s’est suicidée dans l’hôtel où elle avait été placée. La proposition de l’Aide Sociale à l’enfance est de laisser seule dans un hôtel une jeune fille en plein désarroi alors même que la loi Taquet, promulguée en février 2022, interdit les placements en hôtel et la sortie du jour au lendemain des jeunes ayant atteint leur majorité.: Lily a donc été une double victime (mineure placée à l’ASE et non application de la loi censée la protéger).

Le sacrifice de ces jeunes va plus loin quand, finalement, on finit par trouver normal que la sortie de la protection de l’enfance à 18 ans soit la rue, ou quand des mineurs déjà à la rue y restent, faute de prise en charge.

Dans la série des histoires sombres, un des lieux de vie de l’Anvie, entreprise sociale, vient d’être fermée à la suite d’une information judiciaire ouverte pour violences aggravées sur mineurs, défauts de soins, travail forcé et conditions de travail indignes, attentatoires à la vie humaine après des soupçons de maltraitances envers des enfants placés.

Le travail forcé des enfants est donc une réalité en France, soutenu par des statuts de « sous-travailleurs » comme on peut les retrouver dans différents secteurs de politique sociale : celui du handicap avec les ESAT, de ceux et celles dits « éloignéEs du marché de l’emploi », celui des alternatives à la prison, les accueilliEs de l’ASE, etc… . Ces « sous-statuts », fruits des politiques libérales du milieu des années 1980, sont présentés comme des filets de protection sociale nécessaires à l’état social, mais sont surtout au service du capitalisme néo-libéral dans la gestion de la pauvreté.

Pour autant, il ne s’agit pas non plus de mettre sur le même plan la responsabilité de ceux et celles qui y travaillent, avec celle des tutelles, avec l’exploitation et la violence systémique des institutions et ses conséquences pour les femmes, les enfants et les hommes pris dans les rets de ces politiques publiques.

Lyes Louffok, militant des droits de l’enfant, ayant vécu lui-même de multiples placements et Ayda Hadizadeh, présidente des « Oubliés de la République », lancent la création d’un comité de vigilance avec 50 jeunes, anciens placés, pour suivre les travaux de cette commission. Ils et elles ont bien l’intention de ne rien laisser passer. Lyes Louffok rappelle que la responsabilité de l’Etat est entière quant aux suicides, viols ou assassinat de ces enfants.

Au fil des années, les mesures de contrôle se sont de plus en plus substituées aux mesures éducatives alors qu’un ou une jeune qui commet un acte de délinquance est avant tout un enfant en danger. En cela, la rédaction d’un code pénal spécifique pour mineurEs viendrait inévitablement remettre en cause cette notion primordiale en réduisant l’adolescentE à son passage à l’acte.

La justice des enfants, pour davantage « d’efficacité », a surtout besoin de moyens.

Plutôt qu’une criminalisation injuste, stigmatisante et totalement stérile des parents de mineurEs mis en cause dans des actes de délinquance, il s’agit de revaloriser le travail social et éducatif en lieu et place de la seule répression, notamment par des mesures concrètes :

 l’augmentation des moyens humains et matériels de la protection de l’enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse à la hauteur des besoins exprimés ;

 le maintien et le réinvestissement des services publics de proximité, dans tous les territoires de la République ; la place effective de l’avocat aux cotés de l’enfant

Un autre secteur est impacté par ces constats : celui des mineurs étrangers isolés qui n’ont pas d’autre alternative que la rue. Le « nettoyage » de Paris, dans le cadre de la préparation des JO, de toute la population vivant dans les camps aux périphéries de la capitale, dans la ville elle-même en bord de Seine, sous les ponts du métro, etc… renforce l’insécurité des mineurs isolés. Le 3 avril 2024, la Préfecture a franchi un cap supplémentaire dans le traitement raciste de ces centaines de jeunes en évacuant les campements de Pont Marie, Pont Neuf et Sully Morland. Outre l’indignité totale de cette situation de fait, ces campements étaient le seul endroit où dormir et s’organiser un minimum collectivement. Une partie de ces jeunes ont occupés le 104 pendant 48h et obtenu que 125 d’entre eux soient hébergés. A la suite de cela, le Collectif des jeunes du Parc de Belleville s’est installé à la Maison des Métallos depuis le 6 avril et ils et elles craignent d’être évacuéEs par les forces de police.

Cette situation n’est pas propre à Paris.

On estime de 8 à 10000 mineurs étrangers isolés dans toute la France d’Albi à Toulouse ou à Marseille, où un rapport d’Human Rights Watch, constatait : « en janvier 2024, 150 enfants ne bénéficiaient plus de logement après une évaluation négative de leur âge », la plupart étant hébergés provisoirement par des associations et bénévoles, « Le département français des Bouches-du-Rhône, qui comprend Marseille, la deuxième ville de France, ne fournit pas aux enfants migrants non accompagnés les protections dont ils ont besoin et auxquelles ils ont droit. « 

Ça suffit ! Les mineurs étrangers isolés exigent :

 La présomption de minorité

 Des hébergements dignes où ils peuvent rester jusqu’à leur recours, ensemble et en lien avec les réseaux de solidarité, syndicats et associations

 Une couverture médicale digne

 L’accès aux cantines solidaires de la Ville de Paris pour se nourrir

 L’accès à l’école

 Des transports gratuits comme tous les mineurs d’Ile-de-France

 Que leur auto-organisation soit reconnue. Les délégués du collectif des jeunes du parc de Belleville doivent être reçus par la Maire du 20ème, à la Ville de Paris et à la Préfecture

C’est pourquoi PEPS s’associe, co-organise et appelle à la Marche du 21 avril contre le racisme, l’islamophobie et pour le droit à la protection de tous les enfants.

Comme l’appel à cette Marche le dit : « Depuis trop longtemps, la violence de l’État s’abat sur nous de manière arbitraire, injuste, mais, bien plus inquiétant, cible les plus innocents d’entre nous: NOS ENFANTS.

Nos enfants ne sont plus considérés comme des enfants. Ils sont privés de leur enfance. Ils sont suspects dès 10 ans, dès 8 ans, dès 6 ans d’être violents et fanatiques, assimilés à des barbares, voire à des terroristes en puissance à l’instar des enfants de Gaza, maltraités, emprisonnés, tués par milliers….(…) D’un côté, on nous reproche de ne pas savoir élever nos enfants et de les livrer à la délinquance et en même temps on prive toutes les institutions sociales et éducatives de leurs moyens, comme on nous empêche de transmettre à nos enfants nos valeurs et notre histoire comme si elles étaient contraires au vivre- ensemble alors qu’en réalité ce que nous voulons transmettre c’est de l’amour et de la générosité »

Personne n’est illégal !

Nos quartiers s’appellent Solidarité !

Nos quartiers s’appellent Résistance !

Le 21 Avril, nous serons dans la rue pour tous les enfants maltraités, assassinés, traqués de Gaza à Nanterre, de Mayotte à Paris

RDV à Paris, le 21 avril 2024 à 14h pour une grande marche de Barbès à République, avec un concert géant pour pleurer nos morts et fêter l’espoir.

PEPS,

11 avril 2024