
Trump-Musk : la stratégie du choc
Le lundi 20 janvier 2025 restera dans l’histoire comme celui de passage à l’avènement d’une nouvelle oligarchie, celle d’une puissance américaine qui signe l’alliance entre deux fractions du capitalisme, le fossile et le numérique. L’élection de de Trump n’est pas une simple alternance mais une alternative au sein du capitalisme Ce nouveau capitalisme, le techno féodalisme, représente une montée en puissance sans précédent vers un régime de barbarie fondée sur l’expulsion. En cela il renoue avec ce qui a fondé l’histoire des États-Unis d’Amérique, l’expulsion d’origine des peuples indiens et de leur massacre suivi de leur incarcération à ciel ouvert dans les réserves. Cette expulsion fut suivie par celle de la Terre à travers l’extraction des énergies fossiles, du pétrole et du charbon qui furent au fondement de la puissance et de l’impérialisme américain au XXème Siècle. Cette période se termina avec le keynésianisme, réponse au krach économique de 1929, qui engendra un cycle d’intégration des populations avec le développement des États providence en Occident se terminant avec la globalisation des années quatre-vingt.
Aujourd’hui une nouvelle ère s’annonce avec l’avènement de Trump, fondé sur une fuite en avant dans l’extractivisme du capitalisme. En cela l’impérialisme à la mode trumpiste est dans la continuité du précédent. Les méthodes employées sont la politique coloniale, les emprunts internationaux, la politique de défense des intérêts des grands groupes, la guerre. La domination, l’escroquerie, l’oppression, le pillage se déploient ouvertement, sans masque, dans la violence et la brutalité politique.L’accumulation par expropriation passe aussi par la privatisation de services et d’infrastructures publiques. L’école, la santé, la distribution d’énergie, les transports collectifs, les routes, les aéroports, les systèmes de retraite… sont cédés au capital, en l’occurrence à l’homme le plus riche du monde, Elon Musk. La communauté des citoyens se trouve dépossédée au profit d’opérateurs privés. Pour parvenir à ces expropriations, le capital financier a de puissants leviers pour s’attaquer non seulement à l’État Fédéral mais aussi au reste du monde. Les fonds d’investissements spéculatifs (hedge funds) représentent le fer de lance de l’accumulation par dépossession. En menant des attaques spéculatives contre des entreprises détenues partiellement par des États, ils peuvent contraindre ces derniers à vendre leurs actifs. Les organismes internationaux tels que le FMI, la Banque mondiale ou les accords internationaux sur le commerce, sur les droits de propriété intellectuelle, sur les brevets et les licences d’exploitation sont utilisés contre les populations dont on pille les savoirs faires et le patrimoine végétal, génétique, culturel, intellectuel, artistique… Cette politique s’affirme aussi dans le suprématisme blanc, sexiste, homophobe et viriliste dont la cérémonie d’investiture du 47ème Président des États-Unis a organisé la mise en scène avec la venue des Zemmour, Alliot, Meloni, Orban et de toute l’extrême droite internationale. La première décision de la nouvelle administration en sera la démonstration avec l’expulsion raciste en masse des migrants venus notamment d’Amérique Latine…hormis ceux qui ingénieurs dans les nouvelles technologies, peuvent enrichir les GAFAM. Une des suivantes sera la croisade anti-trans dans l’école et l’armée.
La coalition trumpiste formée entre le complexe techno industriel de la Big Tech et les magnats de l’exploitation du pétrole, du charbon et du gaz de schiste repose d’abord sur la volonté de pouvoir forer partout, toujours et sans aucune limite. Plus de technologies exige d’exploiter plus de matières premières. Le développement du numérique et maintenant de l’intelligence Artificielle exige une nouvelle phase de l’extractivisme qui implique que la terre entière, mais aussi les océans et maintenant l’espace sont vues comme une ressource infinie et illimitée à exploiter pour produire des objets tels les Tesla, les smartphones ou les IPAD. L’industrie numérique est d’abord une industrie minière qui exige des métaux rares comme le lithium. Il faut pour les produire et les assembler beaucoup d’extraction d’énergies fossile, nucléaire (l’uranium), d’eau. Mais le techno capitalisme est aussi à l’origine d’un capitalisme de surveillance démultiplié. L’industrie numérique et de l’IA repose sur l’extraction des données personnelles, sur le pillage de la vie privée. Le capitalisme d’expulsion passe par la dépossession de chacun(e). Pour organiser ce contrôle social et transformer en marché chaque être humain, il faut un pouvoir fort et illibéral. Avec le trumpisme et ses émules libertariens comme Milei en Argentine, la boucle est bouclée. Le capitalisme d’expulsion est un capitalisme autoritariste, prêt à tout pour réprimer celleux qui s’opposeront à lui, pour marginaliser celleux qui bifurqueront pour échapper à sa domination. En ce sens l’avènement de Trump annonce une bataille civilisationnelle entre ceux qui veulent imposer une société croissanciste, productiviste, autocratique et celleux qui souhaitent une alternative, celle d’une société désirable, de décroissance choisie, une société où chacun selon ses besoins puissent se nourrir, s’éduquer, se cultiver, vivre, aimer. Contre le capitalisme d’expulsion, pour paraphraser une formule d’une autre époque, expulsé-e-s de tous les pays unissez-vous et organisez-vous !
Moyen- Orient : le cessez le feu n’est pas la paix
La Chine, l’Inde, la Russie, Israël et les états pétroliers du Golfe sont dans la même course à l’extractivisme. C’est pour cela que comme dans les précédentes mondialisations où des impérialismes concurrents se font face, le risque de guerre généralisée est réel. Dans le cas spécifique du Moyen-Orient, la guerre génocidaire menée par Israël contre le Peuple palestinien n’est pas terminée. L’objectif de Netanyahou c’est l’expulsion des Palestiniens de Gaza et de Cisjordanie, c’est le Grand Israël. Pour une grande partie de la classe politique israélienne, le seul État palestinien avec lequel ils peuvent coexister s’appelle la Jordanie. Expulser les Palestiniens des territoires occupés est donc le principal objectif des colons et de leurs alliés. Là aussi les trumpistes ont un projet clef en main : les accords d’Abrahams fondée sur un pacte de « normalisation » entre l’Arabie Saoudite, les Émirats, l’Égypte et Israël, basée sur l’exploitation des matières premières de la région y compris au large de Gaza, sur le développement d’un capitalisme autoritaire régional et la disparition de la question palestinienne. Si l’on peut se réjouir du cessez le feu, 15 mois après le 7 octobre, cette parenthèse n’est en aucun cas la paix. Israël et son gouvernement ont fait de la défaite du peuple palestinien une condition pour la consolidation de sa puissance dans la région. D’autant plus que le seul acteur palestinien qui est resté debout est le Hamas, qu’on le veuille ou non. Les Palestiniens ne veulent pas devenir les tribus indiennes d’Israël. Ils continueront quoi qu’il en coute à se battre pour leur droit à l’autodétermination dans un, deux États ou dans une Confédération Démocratique des peuples du Moyen Orient. C’est à eux de décider et de leur avenir et de leurs formes de lutte, pas à nous. Les dizaines de milliers de morts, les centaines de milliers de blessés ne sont pas, hélas, les derniers. La possibilité de Netanyahou de reprendre les massacres et les bombardements après la libération du premier groupe d’otages est toujours évoqué car il n’a pas changé d’avis sur ses buts ultimes : éradiquer le Hamas et recoloniser Gaza d’une manière ou d’une autre. Trump dans ce cas soutiendrait Israël. Les mobilisations en solidarité avec la Palestine doivent s’élargir face à ces nouvelles menaces.