SNAC : Le gouvernement plie face aux lobbies, la démocratie et la souveraineté alimentaires trahies


Le gouvernement s’est effacé. La Stratégie nationale Nutrition, Alimentation, Climat (SNAC), promise
comme plan phare pour une alimentation saine, durable et juste, a été vidée de sa substance. La SNAC
était censée être la feuille de route de l’État français croisant santé publique, alimentation durable et
transition écologique. Cette feuille de route qui remonte à la Convention citoyenne de 2020, était attendue
depuis 29 mois. Elle visait notamment :

  • à encourager une alimentation avec plus de fruits, légumes, légumineuses, céréales et
    moins de viande/charcuterie.
  • à limiter (voire réglementer) les produits ultra-transformés (AUT), un point central des
    discussions initiales.
  • à encadrer la publicité ciblant les enfants pour les produits trop gras/sucrés/salés, un levier
    important pour la prévention du surpoids/obésité.

Mais la version finale, ou ce qui devait être publiée, a subi des arbitrages majeurs : la mention d’« ultra-
transformés » a été effacée, la « réduction de la consommation de viande » remplacée par le vague «consommation équilibrée », et aucun objectif chiffré n’a été fixé pour finalement bloquer la publication le
28 novembre, juste avant la convocation de la conférence de presse.
En conséquence, la publication a été bloquée par le gouvernement (via Matignon). Face aux pressions des
lobbies agro-industriels, l’État a plié. La santé publique, l’écologie et la justice sociale passent après les
profits. Le jeu de mots qui nous donne ce sigle SNAC, était certainement annonciateur de cette défaite.

Ce recul est une trahison :

  • Pour les femmes, majoritairement en charge de nourrir leur famille et les Autres, invisibilisées
    dans les différents échelons de la gouvernance alimentaire et souvent premières victimes d’un
    système qui exploite leur travail, leurs savoirs et leur environnement.
  • Pour les communautés locales, privées de pouvoir sur leur alimentation et leur territoire.
  • Pour les générations futures, condamnées à subir un modèle industriel polluant et inégalitaire à
    propos desquelles des études montrent le développement des cancers des fœtus ;
  • Pour l’ensemble des habitants et habitantes parmi lesquelles 11 % des adultes sont en insécurité
    alimentaire

L’agro-industrie triomphe : les grandes entreprises dictent la loi, le gouvernement devient complice.
L’ANIA (association nationale industrie agroalimentaire) s’érige en gardienne du statu quo, étouffant
toute possibilité de régulation réelle des AUT (aliment ultra-transformé) sous prétexte d’une définition
non stabilisée et donc de transformation des filières. Des projets locaux, féministes, écologiques et
solidaires montrent qu’un autre modèle est possible. Mais le gouvernement leur ferme la porte.


Cependant, des alternatives existent déjà : des Amaps aux expérimentations basées sur le modèle de la
proposition politique de la Sécurité sociale de l’alimentation (SSA) portées par des initiatives locales, en
passant par le renouveau de la vente directes via les marchés de plein vent ou les boutiques de
producteurs. Tout cela prouve qu’un autre système est possible. Ces alternatives, bien que prêtes à être
mises en place à différentes échelles, se heurtent à la puissance agro-industrielle et à l’impuissance
publique, celle-ci préférant s’allier aux intérêts capitalistes de l’industrie agricole et alimentaire.


Ce retrait est une trahison des mouvements sociaux, des associations, des paysans, paysannes et des
citoyennes, citoyens qui, chaque jour, se battent pour une agriculture paysanne et respectueuse de la
dignité des êtres vivants. Il est impératif de ne pas rester silencieux face à ce recul. Nous avons besoin
d’un plan clair, contraignant, mesurable, qui mette l’accent sur la démocratie alimentaire en se focalisant
sur santé publique, justice sociale et préservation de notre planète. Ce plan doit être anticapitaliste et porté
par des hommes et des femmes politiques courageuses, en rupture avec les logiques néolibérales qui ont
permis à l’agro-industrie de dominer le secteur alimentaire. Mais nous avons surtout besoin que les
communes et les intercommunalités, les départements et les régions se réveillent et rejettent la soumission
à un Etat défaillant concernant l’alimentation.

Ce n’est pas qu’un débat sur la nutrition ou l’environnement. C’est une question de démocratie et de
pouvoir. L’alimentation doit redevenir un Commun, un levier de justice sociale et écologique. Le retrait
de la SNAC n’est pas une erreur : c’est un choix politique qui sacrifie les citoyens et citoyennes au profit
du capitalisme agro-industriel.


La transformation vers l’ agroécologie n’est pas un luxe, ni une option, c’est une nécessité. C’est à nous,
citoyennes, citoyens, paysans, paysannes, femmes à la campagne comme à la ville, collectifs et
associations, de reprendre la main sur nos systèmes alimentaires. Construisons des alternatives
aimentaires locales, d’entraides, solidaires et durables. Le temps de l’action est venu : reprenons
fermement et collectivement, le contrôle de notre alimentation et de notre avenir.


Nous ne laisserons personne décider à notre place.


Que vivent toutes les initiatives « alimentaires », des petites comme des grandes, à la ville comme à la
campagne. Soutenez le réseau EcoAlim de PEPS.

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