Emparons-nous des questions d’énergie !

On n’avait jamais autant parlé d’énergie que dans les derniers mois, avec l’explosion des prix, l’embargo sur le gaz russe, le blocage des raffineries, montrant ainsi le pouvoir du pétrole. Le gaz russe, lui, devrait être pour une part remplacé par du gaz de schiste américain – dont la production est interdite en France, du fait de son impact sur l’environnement.

L’énergie, en effet, est une ressource indispensable à la vie, à l’économie, et tout se paralyse lorsqu’elle vient à manquer. Mais dans même temps, elle est responsable, à travers sa production et surtout ses usages, de l’essentiel de l’effet de serre. Nous l’avons souvent utilisée sans nous en soucier – de façon très inégalitaire selon nos ressources. De fait, nous n’avons pas toujours le choix, embarqués dans un système économique qui pousse à la consommation, à un urbanisme construit autour de l’automobile, embarqués ainsi dans un tourbillon sans fin à la recherche de la « croissance », censée apporter le bonheur.

Et nos dirigeants apportaient encore plus d’« énergie » à cette machine à créer du profit – car le capital est insatiable. Nos gouvernements successifs sont restés inconscients et insouciants face au changement climatique et à ses dégâts, pourtant de plus en plus visibles. Ils ont été et continuent d’être sourds aux mouvements de la jeunesse, consciente que c’est elle qui paiera l’addition.

Aujourd’hui, voilà qu’ils « découvrent » qu’il faut faire quelque chose. « France Nature verte » est née !

Mais comment ?

Nos gouvernants vont utiliser la guerre en Ukraine et le risque de pénurie d’énergie à la fin de l’année pour passer à l’action. Fini de rire, il faut vous serrer la ceinture, le mot d’ordre est maintenant : « sobriété ». Comme le disait la fourmi de La Fontaine « Vous chantiez ? J’en suis fort aise.Eh bien ! Dansez maintenant ! ».

Nous, gouvernement, allons faire de la planification écologique… et relancer le nucléaire afin de sauver le climat. Vite ! 

Mais c’est le monde renversé.

C’est dans ce contexte qu’on prépare en urgence une loi visant à accélérer les procédures de construction de nouveaux réacteurs, en dérogeant aux procédures habituelles. Seul échappe à cette loi le débat public organisé par la Commission nationale du débat publique (CNDP) – une procédure obligatoire pour tout grand projet –, qui doit recueillir l’avis de la population sur le principe du projet. Mais le problème, c’est que le débat public aurait dû précéder la loi, ici c’est l’inverse qui se passe. Cela s’appelle un mépris des citoyen.nes, une conception particulière de la démocratie et une méfiance vis à vis d’une institution qui pourtant fait bien son travail. Cela montre aussi l’opacité et le secret autour de cette énergie, depuis son origine.

Cette fébrilité conduit aussi à se lancer les yeux fermés dans la voiture électrique ; celle-ci a pourtant une empreinte environnementale forte, notamment par les batteries qui consomment une grande quantité de matières premières rares.

Pour faire fonctionner ces voitures, on a besoin du nucléaire… et la boucle est bouclée. En effet, c’est grâce au lobbying efficace d’Emmanuel Macron que le nucléaire est aujourd’hui doté de toutes les vertus, au point qu’il est considéré comme l’énergie de la transition écologique par l’Union européenne. On oublie vite Tchernobyl et Fukushima…et les inquiétudes de l’Europe après la prise d’assaut par les forces russes de la centrale de Zaporijia, montrant l’extrême vulnérabilité en cas de guerre d’ un pays nucléarisé comme l’Ukraine… et la France,

Et pourtant :

comment peut-on parler d’urgence, alors que le premier réacteur ne pourrait être mis en service que dans une vingtaine d’années – une éternité, le temps d’une génération ? qu’en penseront nos jeunes !? Les énergies renouvelables, c’est tout de suite !

comment peut-on décider de consacrer tous les moyens de l’État (c’est à dire ceux des usagers et des contribuables) à ce projet, au détriment des énergies renouvelables, pour lesquelles la France est déjà très en retard ? Une énergie bon marché, dit-on, alors que l’EPR de Flamanville, évalué au départ à 3 milliards d’euros, atteint aujourd’hui 19 milliards d’euros – et encore, il n’est pas achevé.

comment dire que c’est une énergie propre, alors que l’on ne sait pas traiter ses déchets ? Et le prix de notre « indépendance », c’est la mort des populations et des terres exploitées en Afrique, de sociétés ancestrales, comme celle des touaregs.

comment peut-on dire qu’une bonne décision pour l’aménagement du territoire serait de concentrer la production d’électricité sur quelques sites, poursuivant ainsi, avec le TGV et les autoroutes encore en projet, une politique qui produit la métropolisation ? On sait pourtant que cette politique conduit à la désertification des territoires ruraux et à la disparition des services publics.

Citoyennes et citoyens,

– vous verrez passer la loi d’accélération du nucléaire, sans pouvoir rien dire ;

– vous pourrez vous exprimer dans le débat organisé par la CNDP, qui donnera lieu à un compte-rendu et un bilan, mais la loi sera peut-être déjà votée ;

– vous être déjà appelés.es par le gouvernement à donner votre avis sur le mix énergétique, dans une démarche de « concertation » comme celle qui a été organisée en 2019 pour répondre aux Gilets jaunes ; c’est à dire que ce sera le spectacle de Macron et qu’il n’y aura rien à en attendre…

Ainsi va notre « démocratie »…

… mais pensez que les choix énergétiques vont largement déterminer ce que sera le 21ème siècle, c’est une question de société.

On continue comme avant, en pire ? Ou on réfléchit sur ce qu’on voudrait que soit la société de demain, les rapports entre les gens et avec la nature ? Il est temps de prendre notre avenir en mains !