La victoire de Trump,

une étape importante dans la montée du capitalisme barbare.

Le retour de Trump à la Maison Blanche signe l’avènement d’une nouvelle période. En gagnant le vote populaire et celui des grands électeurs, Il dispose de tous les pouvoirs avec des majorités à sa botte au Sénat, à la Chambre des Représentants et à la Cour Suprême. Cela peut impliquer rapidement sur le plan international la défaite de l’Ukraine face à la guerre impérialiste menée par Poutine, l’accentuation de la guerre au Moyen Orient menée par Netanyahou avec l’annexion de la Cisjordanie voire son extension à l’Iran, la montée des tensions avec la Chine, le renforcement des forces d’extrême droite partout dans le monde, le retrait une nouvelle fois des Accords de Paris sur le Climat, une guerre économique de tous contre tous. Sur le plan intérieur aux USA, les attaques contre les droits des femmes et des LGBTQI+ vont continuer. Les immigréEs seront pourchasséEs et expulséEs par millions par la Garde nationale, la police et des milices d’autodéfense comme le proclame les trumpistes qui en profiteront pour en finir avec l’affirmative action (la discrimination positive). Le négationnisme climatique et la destruction de l’environnementseront renforcés par l’abandon des lois de protection environnementales et l’extension du gaz de schiste et l’exploitation du charbon, la mise en sommeil des éoliennes …

L’analyse des conséquences de la victoire de Trump ne s’arrête pas là. Nous devons tirer des leçons de cette élection, de sa signification profonde pour le monde, pour la France et pour la gauche en particulier. Comme la première Révolution industrielle issue du charbon et ensuite du pétrole avait entraîné l’émergence des impérialismes, les deux guerres mondiales, la Guerre froide, le taylorisme et une montée en puissance de la classe ouvrière , la nouvelle révolution industrielle  est caractérisée par le capitalisme de l’Intelligence artificielle, du transhumanisme, et de la géo ingénierie qui succèdent au capitalisme de compromis né avec le Keynésianisme qui avait permis les « Trente Glorieuses » et des avancées sociales négociées avec les syndicats. Ce capitalisme productiviste issu d’une nouvelle révolution industrielle est celui d’une civilisation barbare, d’une civilisation techno-féodaliste sous surveillance qui ne négocie pas et se veut tout puissant. Les technologies numériques actuelles, loin de libérer les individus, les enferment dans une servitude nouvelle, celle des « techno-serfs » ou « techno-prolos » (les nouveaux prolétaires du numérique). Ces derniers produisent de la valeur sans en être rétribués, par exemple lorsqu’ils contribuent aux bases de données des géants du numérique en postant des contenus.

 La victoire de Donald Trump signe la convergence du capitalisme fossile des grandes entreprises extractivistes pétrolières et charbonnières avec le capitalisme high-tech emmené par Elon Musk, propriétaire de X (ex Twitter), de Neuralink, de Tesla et Space X. Cela signifie l’entrée officielle dans une nouvelle ère du capitalisme. Ce capitalisme d’expulsion a désormais une direction identifiée dans le couple Trump – Musk soutenu par les GAFAM. Les États impérialistes du Sud Global (Russie, Chine, Inde…) peuvent avoir des contradictions avec les USA mais leur modèle de société va dans le même sens. Il se propage par l’introduction de « vérités alternatives », la diffusion des « fake news », du confusionnisme et du complotisme. Son modèle est celui du masculinisme, du virilisme et du suprématisme blanc, mâle et hétérosexuel où les minorités de genre, de race, les non-valides, les peuples autochtones n’ont pas leur place. Ce monde barbare n’a plus la gauche et la droite, l’égalité et la liberté comme références politiques. Une autre alternative se met en place : celle qui se mobilise pour la défense de la communauté humaine et terrestre, se confrontant à la barbarie capitaliste sur le mode libertarien et autoritariste. Ce choix se profile dès maintenant. Soit les communautés humaines et le Vivant construiront le pouvoir populaire et gagneront leur autonomie à travers leurs espaces libérés et de nouvelles alliances pour organiser une bifurcation heureuse via un confédéralisme démocratique des peuples. Soit un capitalisme mondial intégré sous forme d’Empires se partageant le monde à travers une troisième guerre mondiale se développera en parquant les dissidences de toute nature dans des camps, des prisons ou des réserves à ciel ouvert. D’ici là ce qui menace c’est aussi une guerre civile mondiale car pour les trumpistes de tout pays, l’ennemi est intérieur au sein de leur propre pays. Retailleau, Bolloré et Le Pen ont les mêmes obsessions : les musulmans, les noirs, les « wokistes », les pauvres sont leurs ennemis. Il faut tous les anéantir pour les “grand remplacer” et instaurer un régime autocratique. Le récit des trumpistes qu’ils soient américains, européens, russes ou indiens est le même : un homme fort défend la loi du plus fort dans un monde devenu une jungle où seuls ceux qui en ont les moyens peuvent être protégés socialement, sanitairement et militairement. Pour les autres, tous les autres comme on le disait autrefois dans l’Empire Romain : “Malheur aux vaincus !”

L’autre grande leçon de l’élection américaine est la division des classes populaires. Pour la première fois, une grande partie des hommes latinos et afro américains ont voté pour un suprémaciste blanc qui n’a jamais caché son mépris pour les raciséEs. Comme une partie de la classe ouvrière blanche et des précaires s’étaient déjà engagés dès 2016 pour lui, le milliardaire de l’immobilier a réussi une performance. Construire une majorité populaire derrière un programme de destruction des acquis sociaux revendiqués comme tels. Cela pourrait se reproduire en France. A la veille du sixième anniversaire du mouvement des Gilets Jaunes, nous savons d’expérience à PEPS, issu de ce mouvement de résistance populaire et de sa convergence avec l’écologie anticapitaliste, que les Gilets jaunes ont toujours été un enjeu entre les nationalistes d’extrême droite et les anticapitalistes. Il y a eu surtout dans les premières semaines une « cohabitation » forcée entre les uns et les autres sur les Ronds- points. Nous avons manifesté sous les mêmes slogans dans une ambiguïté assumée. Les Assemblées des assemblées de Commercy et de Saint-Nazaire tout en rompant avec ce confusionnisme n’ont pas levé cette hypothèse réapparue dans les manifestations antivaccins lors de la crise du Covid. Le RN encouragé par la victoire de Trump va tenter de rejouer le match. C’est pourquoi PEPS a engagé une campagne pour exiger la publication des cahiers de doléances. Si Macron n’a pas voulu les diffuser, c’est qu’ils témoignaient d’un autre avenir possible, celui d’une société égalitaire, écologiste et sociale, loin des fantasmes de la société du repli sur soi, qui exclue les plus faibles et protège les puissants.

La bataille idéologique qui nous attend sera intense. Elle se mènera aussi à gauche où certains comme Roussel ou d’autres pourraient à l’instar d’une partie de la gauche allemande reprendre la rhétorique anti-immigré. Mais le RN encouragé par Trump risque aussi d’aller plus loin en essayant de mobiliser une partie des raciséEs sur l’air connu où « celui qui vient de rentrer referme la porte derrière lui ».

Il nous faut se préparer non seulement à la résistance mais à la contre-offensive. Les démocrates – et c’est aussi la leçon américaine – ont fait de la question démocratique, de l’anti-trumpisme et de la défense des minorités leur seule angle d’attaque. Ils ont abandonné les classes populaires en ne parlant pas de ce qui fait leur quotidien : le pouvoir de vivre, les prix des denrées alimentaires, les loyers chers, la santé et l’éducation. Harris est apparu comme la candidate défendant les riches et les classes moyennes aisées et cultivées, la candidate d’Hollywood et de Wall Street, la candidate du soutien total à Israël. En France aussi nous aurons ce défi. Ne pas abandonner les classes populaires aux néofascistes, prendre en compte leurs besoins de survie et de bien vivre, tout en défendant nos frères et sœurs immigréEs, les raciséEs et les minorités de genre contre la stigmatisation et les agressionsquelles que soient la forme qu’elles prennent.  Face au cauchemar trumpiste, l’heure n’est pas à la résignation, il est à la mobilisation, à la lutte pour le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple !