Le 14 juillet, c’est au peuple !

1. Dans le 18 Brumaire de Louis Bonaparte, Marx dit que la révolution française de 1789 « a accompli la tâche de son époque, à savoir l’éclosion et l’installation de la société bourgeoise moderne, en brisant les morceaux des institutions féodales ».

Mais, comme toute grande révolution, celle-ci connaît différentes étapes selon l’évolution des rapports de force entre les classes, tantôt avançant, tantôt reculant. C’est le cas ici, la révolution s’achève avec le coup d’état de Napoléon Bonaparte et par l’empire.

Mais dans toute cette période, combien de changements !

La première Commune de Paris est instituée après la prise de la Bastille, suivie en août 1792 par la Commune insurrectionnelle sur la base des sections de sans-culottes et des citoyens actifs parisiens. Elle va jouer un rôle moteur dans l’orientation de la révolution.

Le moment culminant est celui de la Convention, avec la déclaration de la République le 27 septembre 1792. La Convention vote le 24 juin 1793 une Constitution très démocratique et décentralisée, ratifiée par référendum. Celle-ci cherche à établir une véritable souveraineté populaire grâce à des élections fréquentes au suffrage universel, le mandat impératif et la possibilité pour les citoyens d’intervenir dans le processus législatif. Mais elle n’a pas pu être appliqué, la situation ayant changé. Elle mérite qu’on s’y arrête, car elle est étonnement moderne, et même, sur bien des points, elle ferait pâlir aujourd’hui maintes constitutions des pays qui se disent « démocratiques ».

Pas de 49-3 ici, permettant de contourner le Parlement, mais une souveraineté populaire fortement affichée face à l’État !

Plus précisément : le suffrage universel masculin (il a fallu attendre l’après-guerre pour que les femmes l’obtiennent enfin ) ; un pouvoir important donné aux assemblées locales pour l’édiction des lois ; le droit de manifester ; des lois qui protègent la liberté publique et individuelle contre l’oppression de ceux qui gouvernent ; la punition des actes arbitraires ; un « droit à l’insurrection » quand le gouvernement viole les droits du peuple ; un contrôle de l’exécutif par le Parlement.

Le décret du 4 février 1794 abolit l’esclavage dans les colonies françaises (celui-ci sera rétabli par Napoléon).

2. Le 14 juillet, symbole de la liberté, est une fête reconnue légalement en 1880 (République) elle veut représenter l’unité nationale et s’accompagnait de défilés populaires. Interrompus par les guerres, les défilés populaires réapparaissent avec le Front populaire puis à l’après-guerre. Ils disparaissent en 1954, suite au défilé au cours duquel la police parisienne a tiré sur le cortège algérien, faisant 7 morts et environ 50 blessés graves.

Aujourd’hui, seul demeure le cortège militaire, changeant totalement le sens du 14 juillet. C’est caricatural avec l’invitation du Premier Ministre indien Norandra Modi, l’invité d’honneur de Macron, qui n’est pas connu pour défendre les valeurs démocratiques dans son pays – son hôte non plus d’ailleurs. Une rencontre de deux illibéraux, avec des discussions sur l’état du monde et la vente d’avions Rafale.

Quel sens aujourd’hui peut avoir le 14 juillet, entre les mains de ceux qui nous gouvernent et qui ne tiennent que par la répression policière et une Constitution qui leur permet de piétiner le Parlement par toutes sortes de subterfuges ? Un Etat qui, au lieu de protéger, s’attaque aux plus faibles? qui n’écoute pas le peuple, comme on a vu sur les retraites ? qui pratique une politique raciste ?

3. Nos dirigeant.es faillissent dans leur charge, ils et elles font honte à notre pays. Nous devons être à la hauteur de celles et ceux qui se sont battu.es pour l’émancipation des opprimé.es, pour le « bonheur commun », comme il est dit dans la Constitution .

L’initiative de la Marche des solidarités pour « la liberté, la justice contre les violences d’État et le systèmes des frontières, le racisme et le nationalisme » mérite être poursuivie et même élargie aux autres droits fondamentaux.

Pas pour fêter l’union nationale avec les classes dirigeantes, mais sous la forme d’interpellations des gouvernements et d’actions symboliques illustrant ce que le peuple fera lorsqu’il aura pris le pouvoir.

Renouons avec l’idée d’un 14 juillet populaire, internationaliste, solidaire, féministe, fraternel, sans armes ni uniformes, partout sur notre territoire

Edito de PEPS du 19 juillet 2023